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Bordeaux, Pokersphère était encore Quai de Paludate. L’endroit respirait le poker depuis 4 niveaux, celui d’un deepstack sur 2 jours avec à la clé un ticket pour le BPT de BORDEAUX. Lumière un peu plus tamisée qu’aux Chartrons aujourd'hui, nous étions sur une table dans la deuxième salle et il y faisait chaud, les 70 joueurs qui étaient en lice avaient réchauffé l’atmosphère tendue de l’enjeu !
John Corback Therme, notre ambassadeur marchait sur notre table et culminait à 130BB. Pas ou peu de résistance et des spots que seul un joueur de son niveau arrive à se construire. Une main ou un flop de rêve quand il faut et pas d’abatage lorsque c’est nécessaire… Tout se passe bien pour notre ambassadeur.

Il me demande même d’essayer mes Ray Ban, la paire de lunette qui me permet de me cacher pour scruter les adversaires et essayer de trouver des informations que je pourrais utiliser… Je possède quelque chose de bien aux yeux du meilleur joueur de POKERSPHERE. C’est pas mon poker, mais c’est déjà une partie de la panoplie du joueur qui brille.
Jonathan ouvre une nouvelle main en milieu de parole et le floor annonce une pause à la fin de la main en cours. Je me rappelle mes lectures et la mini bulle que la dernière main avant la pause crée, resserrement des mains de relance et de défense, et je commence à discerner l’ombre d’un move naître !
Blind 150/300, l’ouverture de vilain est de 2 BB, j’ai 29K au début du coup et je commence à empiler environ 1275 en jetons (j’aime bien faire des piles plus importantes en nombre de jetons lorsque je relance), et je les avance devant moi en les poussant pour que la pile glisse et bascule vers l’avant. Tout le monde folde (l’effet bulle et/ou mon 3 bet ont fonctionnés) et la parole revient à John.
J’observe caché derrière mes lunettes, mais rien. John ne montre absolument rien lorsqu’il rentre dans un coup, juste un rapide tour d’horizon pour visualiser son environnement proche et son regard est perdu dans ses analyses en mode 3 terra de mémoire alors que j’ai l’impression d’être encore au boulier pour calculer mes chances de gagner le coup…
La réponse que j’attendais n’arrive pas, car au lieu de jeter ses cartes, il prépare une pile de jetons un peu plus importante que la mienne pour un min 4 bet ! Les enchères sont portées à environ 2600.
Mon plan n’a pas fonctionné, mais je commence à vouloir à nouveau insister ! Je rassemble mes esprits et je commence à penser et si, et si… Mon adversaire est tout à fait capable de me 4 bet avec tout un tas de mains et ma réflexion m’amène à ne pas lâcher les jetons que j’ai mis au milieu sans combattre. Je ne vous ai pas parlé de ma main car celle-ci n’a pas beaucoup d’importance ici, et c’est la force de celle que j’affiche que je veux continuer à montrer. Je n’ai pas été très actif, mon 3 bet est susceptible de fonctionner surtout suivi d’un 5 bet, et je sais (pense) qu’il ne voudrait pas jouer OOP contre moi si je continue de faire grossir le pot…
Je me souviens très bien avoir vu un bon vieux 52 lorsque j’ai soulevé mes cartes, mais je pensais qu’une mise comme environ deux fois la sienne devrait l’amener à coucher lui aussi sa poubelle ou encore beaucoup de mains qu’il pourrait avoir ! Je pourrais, ou je voudrais ainsi, pouvoir lui montrer mon bluff (P… d’égo). J’ai donc délicatement construit à mon tour une pile de jetons correspondant à quelque chose comme 5600 et toujours essayé de les pousser de la même façon au milieu.
Toujours aucune réaction notable sur le visage de l’ambassadeur. Aucune manifestation particulière. Les yeux d’un disque dur qui tourne, plantés dans le tapis violet en face de lui.
La seule chose à noter, est un temps de réaction un peu plus long. Il lui fallut quelques minutes pour commencer à bouger ses mains, non pas pour pousser ses cartes en dehors du jeu, mais pour à son tour faire une nouvelle plus grosse pile que la mienne. Me voilà victime d’un 6 bet. C’est l’effondrement de mon move, je ne vais pas pouvoir lui montrer mon bluff, enfin seulement ma tentative de bluff pour qu’il voit ma capacité à m’opposer à sa main mise sur la table (je ne suis plus sûr aujourd’hui que ce soit une bonne solution avec 5 et 2 !).
Je retourne donc mes cartes pour expliquer pourquoi je baisse pavillon et au lieu que cela satisfasse mon égo, John finit par tout gâcher en retournant 9-5 de trèfle pour ce que je me souviens me venir à l’esprit : « mais comment fait-il » ?

C’est la pause, et malgré tout pas catastrophique, mon stack reste confortable à 60BB à la reprise du jeu sur les blinds 200/400. Mais le plus important arrive…
Je m’empresse de me porter à la hauteur de mon opposant afin de lui demander ce qui l’a amené à me faire ce move. Réponse tellement simple dans sa bouche : « tu n’aurais shove que AA et KK » ! CQFD. J’ai tiré plein d’enseignements de cette joute avec ce jeune audacieux qui joue au poker comme je conduis ma voiture…